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Exposition
Après des années d'exil, retour de trois portraits de Goya !
Après des années d'exil, retour de trois portraits de Goya !
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| Nicholas Bray 908 mots

Après des années d'exil, retour de trois portraits de Goya !

(Cliquez sur le 1er visuel afin de voir les 2 autres) Depuis le 26 avril, le Musée des Beaux-Arts de Bilbao expose trois magnifiques portraits peints par Goya d’une famille noble de Biscaye, les Adán de Yarza, redécouverts après des années d’exil dans la foulée de la Guerre Civile d’Espagne.

La réapparition de ces trois toiles apporte de nouvelles connaissances importantes sur l’œuvre de Goya. Peints autour de 1787-88, les portraits d’Antonio Adán de Yarza, de son épouse María Ramona de Barbachano et de sa mère Bernarda Tavira sont de l’époque où Goya travaillait pour la Cour de Charles III tout en se lançant dans une carrière de portraitiste.

Les trois tableaux exposés à Bilbao furent peints à Madrid, peu avant ou peu après le mariage le 19 décembre 1787 à Mondragón d’Antonio Adán de Yarza, descendant d’une illustre famille biscayenne et avec María Ramona de Barbachano, issue d’une famille de riches commerçants de Bilbao.

D’une sobriété imposante, Antonio porte un frac orné de boutons et doublé en soie au-dessus d’un gilet à double rangée de boutons et d'une chemise à jabot. Coiffé au naturel, selon la mode lancée à l’époque par les jeunes aristocrates anglais, il tient une cravache à la main droite. Sa mère, Bernarda Tavira, impassible sous une coiffe de rubans bleus et une perruque poudrée au ton gris bleuté, est représentée dans une robe de satin de couleur pourpre et aux lisères bleues surmontées de volants en gaze de soie. Devant la poitrine, elle tient un œillet blanc veiné de rouge.

Quant à Maria Ramona, resplendissante sous un magnifique chapeau noir orné de plumes et de gaze, elle est vêtue d’une robe de mousseline de style anglo-français et de gants longs en soie. Son visage est maquillé à la mode espagnole de l’époque, avec du rouge sur les joues et les lèvres. Sous son chapeau, elle porte une perruque poudrée qui accentue son air de jeunesse. Dans sa main droite, un éventail surmonté de plumes ressemble à celui que porte l’une des filles du duc et de la duchesse d’Osuna dans le portrait exécuté par Goya à la même époque.

Transportés de Madrid en Biscaye en 1794, les trois tableaux furent accrochés dans le palais de Zubieta, de l'imposante propriété de la famille Adán de Yarza près de Lekeitio. Mentionnés par l’historien de l’art Aureliano de Beruete en 1916, puis photographiés en 1930 par la revue Blanco y Negro, ils firent l’objet d’un article dans la revue Vida Vasca en 1936. Ce fut leur dernière apparition en public jusqu’à nos jours.

Dès novembre 1936, les trois portraits furent pris sous la protection du Gouvernement d’Euzkadi, comme ce fut le cas pour de nombreuses autres œuvres d’art, afin de les protéger des ravages de la Guerre Civile. En 1937, ils partirent à Paris pour être exposés dans la section Euzkadi du pavillon d’Espagne à l’Exposition Universelle.

L’espace étant trop petit, les portraits ne furent pas montrés. Récupérés par les représentants du gouvernement basque à Paris, ils furent rendus à leur propriétaire, María Adán de Yarza, descendante directe d’Antonio, qui s’était réfugiée à Biarritz. Célibataire, elle ne retourna jamais en Espagne. Lors de sa mort en 1947, ses possessions, y compris les tableaux, passèrent en héritage à son filleul. Pendant des décennies, les trois portraits disparurent sans laisser de trace.  

Ce ne fut qu’au cours des années 1990, dans des conditions d’extrême confidentialité, que quelques spécialistes purent les inspecter. S’ensuivirent de longues années de réflexion et de tractations légales complexes. Finalement, grâce entre autres à l’intervention du directeur à l’époque du musée du Prado, Miguel Zugaza, aujourd’hui directeur du musée de Bilbao, un accord avec les autorités espagnoles fut conclu permettant le retour des oeuvres en Espagne.

En 2017, les portraits, accueillis tout d'abord par l' inspection au Prado, seront transferés ensuite au musée de Bilbao, où ils ont fait l’objet d’un processus de nettoyage et restauration qui a permis de dissiper tout doute sur leur authenticité.

Les trois tableaux étaient couverts de salissures, se rappelle José Luis Merino Gorospe, chef du département de conservation et de restauration du musée. Faits exceptionnels pour des oeuvres d'une telle ancienneté, cependant, ils n’avaient jamais subi de rentoilage et ils se trouvaient sur leurs châssis d’origine en bois de pin. Sur le dos du portrait de Bernarda Tavira, une inscription sur papier spécifiant le nom du sujet a été identifiée comme étant de la main de Goya.

Aujourd’hui, les portraits sont accrochés dans la salle W pour War (Guerre) de l’exposition ABC – L’Alphabet du Museé de Bilbao, qui fête les 110 ans du musée, accompagnés par des exemplaires des publications dans lesquels ils furent mentionnés sur le au cours de la première partie du siècle dernier ainsi que des documents officiels les concernant, de l’époque de la Guerre Civile.

Sur le mur en face des portraits, telle une œuvre d’art contemporain, se trouve la caisse en bois dans laquelle ils firent leur voyage de Bilbao à Paris et ensuite vers d’autres destinations. Dans une présentation qui maintient l’air de mystère qui les entoure, les portraits de Goya de Zubieta des anciens propriétaires du palais de Zubieta sont revenus de leur exil !

Jusqu'au 1er octobre 2019, exposition de trois portraits de Goya Antonio Adán de Yarza, son épouse María Ramona de Barbachano et de sa mère Bernarda Tavira dans la salle W pour War (Guerre) au musée Bellas Artes de Bilbao. Tous les jours sauf le mardi de 10h à 20h.

 

Son épouse María Ramona de Barbachano par Goya
Son épouse María Ramona de Barbachano par Goya © DR
Son épouse María Ramona de Barbachano par Goya
La mère de Antonio Adán de Yarza, Bernarda Tavira par Goya
La mère de Antonio Adán de Yarza, Bernarda Tavira par Goya © DR
La mère de Antonio Adán de Yarza, Bernarda Tavira par Goya

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