"Plus les lignes et les formes sont simples, et plus il y a de la beauté et de force ", avait écrit Jean-Auguste-Dominique Ingres (Montauban 1780- Paris 1867).
Après avoir été restaurée au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France, des ateliers de Versailles, le chef-d'œuvre "la Baigneuse en buste de dos" d'Ingres a retrouvé ses couleurs d'origine. Car avec le temps, le vernis devenu opaque jaunissait l'œuvre, atténuant le contraste entre la couleur diaphane de la peau, le blanc éclatant de la coiffe, et les couleurs du paysage. Quant au cadre, il avait également perdu de son éclat.
"Notre "Joconde" de la collection Bonnat, avaient souligné le directeur du musée Barthélémy Etchegoyen-Glama et Hélène Ferron, responsable des collections, en présence de Jean-René Etchegaray, maire de Bayonne et de son équipe, sera placée autour des plus prestigieux chefs-d'œuvre anglais de Thomas Lawrence, et espagnols, dont l'autoportrait de Goya, dans l'intimité d'une belle salle du musée Bonnat-Helleu.
L'œuvre-phare du musée, peinte à Rome en 1807, rappelle les maîtres de la Renaissance italienne - tels que Raphaël et plus spécifiquement Léonard de Vinci - par son format, ses couleurs, sa calligraphie, et ses plans.
Ni de face, ni complètement de dos, cette beauté indicible, malgré un cou lacéré d'un bourrelet disgracieux dû à la plissure de la peau, fascine les amateurs d'art. Et Léon Bonnat, en grand collectionneur qui portait beaucoup d'intérêt au travail de Jean-Dominique Ingres, avait également acquis près d'une centaine de ses dessins.
Quant à Ingres, pour des raisons financières dues à l'instabilité politique, et bien qu'il avait été nommé lauréat du Grand Prix de Rome en 1801 à la suite de son tableau "Les Ambassadeurs d'Agamemnon" inspiré de l'Antiquité classique, l'ancien élève de David quitta Paris seulement en septembre 1806 pour s'établir durant trois ans à la villa Médicis, séjour offert à Rome à l'Académie française.
Tout en s'imprégnant des chefs-d'œuvre italiens qui l'environnaient, Ingres influencé par la fièvre orientaliste très à la mode à l'époque Empire, se serait inspiré des célèbres lettres turques si prisées de Lady Wortley Montagu, l'épouse d'un ambassadeur anglais à Constantinople. Des écrits qui décrivaient avec sensualité et volupté les nues des « bains du sérail de Mohammed ». Dans un élan créatif s'immisçant progressivement dans le bain exotique, Ingres réalisa donc une série de quatre tableaux de baigneuses orientalistes : la première et la plus énigmatique : "la Baigneuse en buste de dos" (1807) ; lui succéderont "La Baigneuse de Valpinçon" (1808) - dont le dos trop long non conforme inspira "le violon" de Man Ray -, "la Grande Odalisque" (1814), "le Bain Turc" (1863). Ces trois derniers tableaux figurent au musée du Louvre.
Quant à celle qui a été surnommée "notre Joconde du musée Bonnat", en réalité "La Baigneuse" d'Ingres, le public pourra la découvrir parmi les 1.300 œuvres restaurées qui seront exposées dans le futur parcours de la visite, sachant que le riche musée Bonnat-Helleu compte au total 7.000 œuvres d'exception en dépôt.
Après 15 ans de fermeture, le maire de Bayonne se réjouit de la réouverture - en novembre prochain - du musée, qui fera briller la ville internationalement.