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Tradition de la semaine
Terre Sainte, objet de convoitise politique et religieuse
Terre Sainte, objet de convoitise politique et religieuse

| François-Xavier Esponde 995 mots

Terre Sainte, objet de convoitise politique et religieuse

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Terre Sainte ©
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On la désigne ainsi “Terra Santa” depuis le temps des croisades, cet espace symbolique des uns, imaginaire des autres, cartographiée dans la mémoire et disputée dans l’histoire.

Juifs, chrétiens, musulmans la réclament comme à la source même de leur tradition spirituelle, sans exclusive, sans exclusion, bien commun des populations et des lignées abrahamiques depuis l’origine, mais l’histoire récente en a changé quelques donnes.

De fait continu la Terra Santa n’a jamais vécu sans guerre ni tribulation entre les populations autochtones.
En rappelant que la définition naît des récits bibliques relatifs à la mémoire d’Abraham fixés au VIème siècle avant JC, on se remémore l’exode du peuple juif à Babylone. Une privation pour ce peuple exilé, ayant connu la destruction du temple sacré de sa foi juive, jaloux de la force d’une alliance exclusive avec son Dieu l’Unique, telle est sa résistance originelle depuis toujours !

Terra devient signe de cette alliance avec Dieu, un horizon, une promesse inachevée, faite pour le croyant de devoirs et de retours.
Et chacune des trois traditions abrahamiques voudra s’en réclamer parfois au détriment des deux autres, sans précaution ni préparation au vivre ensemble obligé sur cette minuscule terre orientale des origines judéo-chrétiennes de la foi.

Une définition manquerait encore si le croyant n’associait la primeur d’une pureté d’un espace sacré exclusif à cet horizon de la foi particulièrement prégnant dans le judaïsme et l’islam où l’observance des lois religieuses en matière de pureté sont décisives.

Terra santa devient dans l’imaginaire universel “un sanctuaire spirituel” s’entend, une terre sacrée, un horizon d’observances rituelles comme en ces temples paiens jadis anté judéo chrétiens, où la symbolique y était forte et le rapport du dedans et du dehors, du rite et de l’interdit dominaient.

« Le Saint des Saints » occupait ce lieu, l’Eternel l’habitait, seuls les grands prêtres y avaient accès, l’espace cultuel alentour accueillait les fidèles et les non juifs dans une cour extérieure, mais en chacun de ces lieux l’ordonnancement des tâches était dirigée par la règle instruite par les lois du Temple de Jérusalem fondé par Salomon !

C’est au prix des guerres, des deux exils forcés, de la destruction par deux fois du temple sacré de la ville sainte que les juifs eux mêmes auront acquis le sens donné à la Terra Santa !

En détruisant le temple les ennemis de la foi ont développé dans le judaïsme leur endurcissement et leur force spirituelle à restaurer cette appartenance religieuse hors d’Israël, tout ce temps de l’exil comme rapporté par les textes historiques et restauré par un retour progressif sur le pays de leurs racines pour ce peuple de la tourmente et de la relégation, résume la résolution de leur alliance.

Chacun fidèle juif devenant son temple sacré intérieur, sa mémoire religieuse enseignée dès le premier âge aux enfants de la torah, des rites sacrés souvent pratiqués en cachette pour ne retenir l’attention et se fondre dans la masse, la foi juive n’a cessé de résister au fil de son histoire aux aléas de ce parcours jamais gagné pour lui.

Pour le juif de l’alliance Israël, la terre des prophètes, les lieux sacrés de la foi juive sont irrécusables.

Pour les chrétiens le lien entretenu avec Israël des sources originelles est variable selon l’attachement ajouté au contexte socio politique engagé avec la modernité, ce particulièrement depuis la fondation de l’Etat moderne d’Israël en 1948.

 Lorsque le site, les hommes, les lieux sacrés, la culture judéo chrétienne, l’histoire palestino chrétienne insérée in situ menacent l’unité de la foi biblique de Jésus les esprits se réveillent à nouveau pour préserver l’essentiel du relatif, du déroulé historique. Il en est aujourd’hui de l’avenir de ce conflit fratricide judéo palestinien, chrétien où les religions sont mêlées bon gré malgré à une brisure du lien ombilical de la terra santa, et les conséquences pourraient devenir fâcheuses pour la préservation de la mémoire sacrée des trois religions.

 L’abandon de ces référentiels de l’histoire pourrait à terme idolâtrer une fois encore l’appartenance à la terre sainte, aux cultes et aux auteurs d’une littérature païenne à la faveur de la terre, de la nation, du patriotisme et de l’identité éloignées de la tradition de la foi juive en Israël ancrée à l’Eternel et son exclusivité religieuse !
L’histoire apprend que ce lieu viscéral avec la terra santa fut commenté diversement comme ce fut le cas de Grégoire de Nysse qui souligna que “le seigneur n’avait jamais indiqué le voyage-pèlerinage à Jérusalem comme une bonne action de la foi”!

Objet de conflit et de dispute théologiques, entre juifs et chrétiens des origines, on dut se résoudre à admettre la pratique du pèlerinage laissée à la foi de chaque fidèle par delà  les règlements autoritaires imposés sur le parcours à tout un chacun.

Nouveau venu dans ce paysage judéo-chrétien originel l’islam se réclama de cet héritage en 692 la construction du Dôme du Rocher à Jérusalem est vue comme la restauration du temple primitif dévasté de la ville sainte.
Et l’invite est explicite pour les chrétiens, “ne dîtes pas trois, dites un”, comprenez sans Trinité ni différence originelle de la part du dieu Un de l’islam !

On est en Orient, les disputes sont courantes, les religions n’y échappent, à l’époque byzantine les chrétiens vénèrent l’empreinte d’un pied de Jésus mais hors de l’enceinte du temple, seul souvenir de sa présence symbolique.

Mais cette empreinte deviendra au IXème siècle celle du pied de Mahomet et on ne plaisante pas avec ces espaces sacrés dits saints à Jérusalem dans une appropriation plus ou moins justifiée de leur origine.

Au Moyen Age les musulmans arboreront leurs cultes aux lieux saints comme venant de la tradition des “Mérites de Jérusalem”, au risque de divisions internes entre tenants de la Mecque des uns et de Dôme du Rocher des autres,

Objet complexe des rites et des observances parfois éloignés de la foi elle même, Jérusalem réunit la triologie du monothéisme religieux abrahamique d’hier et d’aujourd’hui.
Non sans difficulté, les évènements actuels le prouvent abondamment.

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