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Conférence
Musée Basque : « Les lumières de Charles Carrère » par Odile Contamin
Musée Basque : « Les lumières de Charles Carrère » par Odile Contamin

| Anne de La Cerda 995 mots

Musée Basque : « Les lumières de Charles Carrère » par Odile Contamin

zConférence Vitraux de Charles Carrère, abbaye des soeurs bénédictines de Belloc.JPEG
Vitraux de Charles Carrère, abbaye des soeurs bénédictines de Belloc ©
zConférence Vitraux de Charles Carrère, abbaye des soeurs bénédictines de Belloc.JPEG

« Les lumières de Charles Carrère », tel est le titre de la conférence que donnera jeudi 3 février à 18h au Musée Basque et de l’Histoire de Bayonne Odile Contamin, docteur en Histoire de l’Art, dans le cadre des activités de la Société des Amis du Musée Basque 

Voici presqu’un an s’éteignait le maître-verrier Charles Carrère, passeur de lumière. Âgé de 93 ans, il avait reçu dernièrement la conservatrice du musée Basque et d’histoire de Bayonne Sabine Cazenave dans sa maison-atelier d’Anglet à l'occasion de second leg 2020. Rappelons qu’il y a moins de dix ans, le musée Basque avait reçu un magnifique don de 500 dessins du maître-verrier, cartons et vitraux à la suite duquel le Maire de Bayonne Jean Grenet lui avait remis en 2014 la médaille de la Ville. Charles Carrère légua encore des mosaïques, dont l’une représente l’ancien blason de la ville, inspiré de la clé de voûte de la cathédrale de Bayonne. N’ayant pas de sucession, il avait également offert le vitrail de l’enfant abandonné dans ses langes, rappelant l’origine de la maison Dagourette qui avait servi d’hospice pour les orphelins.

Aussi, éblouie par cet artiste si personnel et actuel, Sabine Cazenave s’était émue de la disparition de l’artiste : « J'ai eu l'immense  honneur de découvrir l'oeuvre intime de Charles Carrère, et c'est  celle-ci que nous vous ferons découvrir en priorité... », en évoquant l'exposition-dossier « Les caprices de Charles » prévue pour les prochains automne-hiver. Avant de faire redécouvrir plus tard, dans une « approche-rétrospective, lorsque sera abordée la richesse du XXème siècle en Pays Basque, en Gascogne, à Bayonne et Anglet… dont Charles l'homme, et le rêveur cultivé était le très vivant portrait, et les oeuvres constituent le témoignage précieux ».
Car, comme à tous ses visiteurs, Charles Carrère ouvrait une succession de portes avant de les faire pénétrer dans le monde secret de sa maison-musée « Belite » à Anglet où il dévoilait les multiples facettes de  son imagination fantastique et surréaliste.

 Une féerie de couleurs dans ses jardins intérieurs
Avec son bâton de pèlerin, ce chrétien déterminé désigna un autoportrait précis : enfant, il étudia à l’école de la rue de Luc à Bayonne, dirigée par les Frères des Ecoles Chrétiennes, une éducation qui marqua son travail. « Il garda toujours un lien charnel avec la cathédrale Sainte Marie où il aimait se recueillir seul, dans le silence et la prière. La Bible demeurait son livre du quotidien », explique pour sa part l’abbé Esponde.

A l’École municipale de dessin et de peinture de Bayonne, auprès de son directeur Louis Frédéric Dupuis, tout comme - peu après - le peintre Jean-François Simon, Charles Carrère fut formé au fusain, à l’antique et à la sanguine, techniques particulièrement précieuses pour le vitrail. Parallèlement à son activité picturale, une fois son brevet passé, il entra aen apprentissage vec l'aide de l'architecte Gomez chez le renommé maître-verrier Jean Lesquibe qu’il ne quittera plus jusqu’en 1976.

Fidèle disciple - pendant trente ans -, il dessina ou restaura les vitraux pour la plupart des églises souletines, et d’autres édifices religieux du Pays Basque et des Landes. A l’initiative des moines de l’abbaye de Belloc à Urt, l’artisan avait ajouté des phrases et des mots en euskara. Par ses créations, il participa au mouvement de réforme liturgique de l’Eglise catholique après le Concile de Vatican II. Les thèmes de ses vitraux insistaient sur la Communion sous forme des Saintes Espèces comprenant le partage du  pain et du vin, produits du blé et de la vigne. Les colombes, symboles de la  Résurrection du Christ et de l’Esprit-Saint y sont représentés.

Après trente ans de loyaux services auprès du célèbre maître-verrier Jean Lesquibe, c’est à partir de 1977 que Charles Carrère installa son atelier dans sa maison natale « Belite », rue de Hausquette à Anglet. Avec une pointe de satire, il m’avait dit : « j’avais tellement de projets que j’ai  démarré comme une fusée »
Sous la puissance de son fusain, de son crayon, de sa plume, de son pinceau, les multiples autres talents de dessinateur, de peintre, de mosaïste explosèrent en un feu d’artifice laissant ainsi  s’échapper une féerie des couleurs dans ses jardins intérieurs.
Disposant enfin d’espace, Charles Carrère réalisa alors un nombre considérable de vitraux et de mosaïques pour des particuliers, dans le Sud-Ouest de la France, à Paris et à l’étranger.

Lumières dans la nuit
Enrichissant ses rêveries, il s’inspirait de la musique de Richard Strauss ou de Claude Debussy. A la lecture des poésies de Jacques Prévert apprises à l’école, le vitrail « l’éveilleur au matin ouvre les fleurs » vit ainsi le jour. Cette vision cristallisée à la lumière de l’aube avait été précédée d’une esquisse au fusain suivie du modèle d’un carton servit à la  découpe des verres d’un ton rose-orangé. Maître dans l’art, il essayait « d’apprivoiser la lumière et de faire vibrer les couleurs » à travers ses vitraux.

En parallèle, Charles Carrère avait achevé une série de dessins au fusain d’après les fables de La Fontaine. Dans « La mort et le malheureux», l’artiste influencé par les danses macabres rappelait les procès de sorcellerie au Pays Basque peints par José de La Peña.  Utilisant la dualité de la mort et de la vie évoquant également Goya, il commenta son dessin « la cathédrale de Satan » : « le fond de l’Enfer n’est pas en feu, les damnés sont enfermés dans des blocs de glace, alors que dans le rendez-vous des sorcières, elles m’ont été suggérées par les arbres dont les nœuds figureraient leurs têtes ».  Ou encore, en regardant son fusain « ce personnage qui tient son ombre en laisse : au lieu de suivre sa part de lumière, il tire sa part d’ombre », avait-t-il achevé.
Son univers fantastique, bestiaire, peuplé d’hommes-objets, oiseaux ou chevaux et de violons insectes bruegéliens, débordait de créativité et ne cessait d’étonner.

Entrée gratuite, Xokoa Auditorium / Réservation obligatoire au 05 59 59 08 98 pour respecter la jauge limitée à 40 personnes - Pass sanitaire obligatoire et port du masque exigé.
Nota : La conférence de Janie Cailliau "Les caprices ou les extravagances d'un Maître verrier", toujours dans le cadre de l'exposition consacrée à Charles Carrère, a été reportée au Jeudi 17 Février 2022 (18h - Xokoa Auditorium).

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