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Cinéma
La critique de Jean-Louis Requena
La critique de Jean-Louis Requena

| Jean-Louis Requena 597 mots

La critique de Jean-Louis Requena

« Antoinette dans les Cévennes » - Film français de Caroline Vignal – 105’
A Paris, Antoinette (Laure Calamy) est professeur des écoles. Elle fait participer sa classe aux fêtes de la fin de l’année scolaire. Elle dirige la chorale formée par ses élèves afin qu’ils chantent, devant les parents médusés, Amoureuse de Véronique Sanson, hymne quelque peu torride à l’amour interdit. Dans l’assistance, un bel homme comprend l’allusion et sourit, complice : c’est Vladimir (Benjamin Lavernhe) père d’une fillette, élève d’Antoinette.

A la fin de la fête, Vladimir rejoint Antoinette dans sa classe. Après quelques rapides effusions empêchées, il lui annonce qu’il part en vacances dans les Cévennes avec sa femme (Olivia Côte) et sa fille. Antoinette est abasourdie car elle pensait partir une semaine, en amoureux, avec Vladimir. Elle est désemparée, anéantie.

Désespérée, elle décide de partir, elle aussi, sur les traces de l’écrivain écossais Robert Louis Stevenson (1850/1894) qui, en 1878, par désespoir amoureux, avait parcouru les Cévennes avec son ânesse Modestine et dont il avait publié le récit en 1879 : Voyage avec mon âne dans les Cévennes. Antoinette espère en effectuant une partie du chemin de grande randonnée (GR70) rencontrer son amoureux. Au gîte rural, base de départ, elle est reçue avec quelques rudesses par les gérants. Au repas pris en commun, où des randonneurs expérimentés sont attablés, elle est soumise à un feu roulant de questions : une convivialité forcée s’établit. On l’avertit : marcher aux côtés d’un âne n’est pas de tout repos. La bête est capricieuse !

Le lendemain matin, le gérant prépare l’âne bâté qui accomplira la randonnée avec Antoinette. Celui-ci a une robe grise, de grandes oreilles mobiles, et s’appelle Patrick. Le gérant bourru délivre quelques brefs conseils à Antoinette : elle doit impérativement s’imposer à l’âne !
L’équipage part à la recherche de Vladimir quelque part dans les Cévennes …

Après vingt ans de silence au cinéma (Les Autres Filles – 2000, premier opus autobiographique), Caroline Vignal, diplômée de la FEMIS (promotion 1997, section scénario), a écrit et réalisé son deuxième long métrage sur cette recherche de l’amant marié sur les sentiers cévenols. Le résultat aurait pu être barbant : une histoire plate, poussive, répétitive étalée sur 1heure et 35 minutes. Il n’en est rien ! Dès les premières scènes drôlatiques la réalisatrice emballe le film grâce à une comédienne pétulante à fort potentiel comique : Laure Calamy dont c’est le premier grand rôle au cinéma. Sa vivacité, sa palette comique, son tempérament burlesque, dynamisent toutes les scènes où elle apparaît, portée, il est vrai, par un scénario astucieux. Fort heureusement, elle ne quitte quasiment jamais l’écran. Elle forme un duo comique, parfois pathétique, avec son âne Patrick : elle, agitée à la recherche de son amour coupable, lui placide, indolent, quelquefois récalcitrant, mais finalement sensible aux émotions remuantes de sa partenaire.

Caroline Vignal filme avec une économie de moyens sans chercher à trop en faire (jeux des comédiens humains et animaux), en s’appuyant sur les images somptueuses (scope couleur) de son chef opérateur Simon Beaufils. Les refuges, les sentiers, les montagnes de Lozère sont photographiés avec un sens « westernien » de l’espace, de la beauté des paysages où s’inscrivent dans ce jardin d’Éden, quelques êtres vivant en liberté.

Antoinette dans les Cévennes était dans le Sélection Officielle du Festival de Cannes 2020 qui n’a pas eu lieu pour cause de confinement. C’est dommage car peu de comédies ont eu accès au premier festival de cinéma du monde (dernière comédie Palme d’Or : M.A.S.H de Robert Altman (1925/2006) en … 1970 !). Antoinette dans les Cévennes en a gardé le label « Cannes 2020 » et cette réjouissante comédie hors des sentiers battus, mérite le détour.

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