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Il n’y a pas de pensée sans mots. Il n’est pas de beauté sans la pensée de la beauté...
Il n’y a pas de pensée sans mots. Il n’est pas de beauté sans la pensée de la beauté...

| baskulture 676 mots

Il n’y a pas de pensée sans mots. Il n’est pas de beauté sans la pensée de la beauté...

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Les Amis d'Hossegor défendent "l'élégance océane" ©
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L'Association littéraire des Amis du lac d’Hossegor l’a écrit, dit et clamé : « C’est la beauté et elle seule (sous toutes ses formes) qui va garantir l’avenir d’une station exceptionnelle comme Hossegor… Mais pour cela il faut du courage et de la lucidité ! »
Et parmi les moteurs essentiels qui ont poussé les Amis du lac à créer leur association, au patrimoine architectural de la belle villégiature de la côte sud des Landes qu’ils défendent résolument s’ajoute celui de la littérature et les écrivains. 
Il n’étonnera donc personne que l’association dirigée par son dynamique président Eric Gildard reprenne à bon escient dans sa dernière « Lettre » cette tribune de Christophe Clavé (*) sur « l’appauvrissement de notre langue », dans la mesure où en prévision du centenaire d’Hossegor qu’ils s’apprêtent à fêter en 1923 en renouant avec cette « Elégance océane », les Amis du Lac sont bien conscients « qu’il n’y a pas de pensée sans mots. Il n’est pas de liberté sans exigences. Il n’est pas de beauté sans la pensée de la beauté »… ALC 

« La disparition progressive des temps (subjonctif, passé simple, imparfait, formes composées du futur, participe passé…) donne lieu à une pensée au présent, limitée à l’instant, incapable de projections dans le temps. 

La généralisation du tutoiement, la disparition des majuscules et de la ponctuation sont autant de coups mortels portés à la subtilité de l’expression. Supprimer le mot « mademoiselle » est non seulement renoncer à l’esthétique d’un mot, mais également promouvoir l’idée qu’entre une petite fille et une femme il n’y a rien, ouvrant la porte aux courants pédophiles... Moins de mots et moins de verbes conjugués c’est moins de capacités à exprimer les émotions et moins de possibilité d’élaborer une pensée. 

Des études ont montré qu’une partie de la violence dans la sphère publique et privée provient directement de l’incapacité à mettre des mots sur les émotions. Sans mot pour construire un raisonnement, la pensée complexe chère à Edgar Morin est entravée, rendue impossible. Plus le langage est pauvre, moins la pensée existe. 

L’histoire est riche d’exemples et les écrits sont nombreux de Georges Orwell dans 1984 à Ray Bradbury dans Fahrenheit 451 qui ont relaté comment les dictatures de toutes obédiences entravaient la pensée en réduisant et tordant le nombre et le sens des mots. Il n’y a pas de pensée critique sans pensée. 
Et il n’y a pas de pensée sans mots. 
Comment construire une pensée hypothético-déductive sans maîtrise du conditionnel ? Comment envisager l’avenir sans conjugaison au futur ? Comment appréhender une temporalité, une succession d’éléments dans le temps, qu’ils soient passés ou à venir, ainsi que leur durée relative, sans une langue qui fait la différence entre ce qui aurait pu être, ce qui a été, ce qui est, ce qui pourrait advenir, et ce qui sera après que ce qui pourrait advenir soit advenu ? 

Si un cri de ralliement devait se faire entendre aujourd’hui, ce serait celui, adressé aux parents et aux enseignants : faites parler, lire et écrire vos enfants, vos élèves, vos étudiants. Enseignez et pratiquez la langue dans ses formes les plus variées, même si elle semble compliquée, surtout si elle est compliquée. Parce que dans cet effort se trouve la liberté. Ceux qui expliquent à longueur de temps qu’il faut simplifier l’orthographe, purger la langue de ses « défauts », abolir les genres, les temps, les nuances, tout ce qui crée de la complexité sont les fossoyeurs de l’esprit humain. Il n’est pas de liberté sans exigences. Il n’est pas de beauté sans la pensée de la beauté. 
Christophe Clavé.

(*) Diplômé de Sciences-Po Paris, titulaire d’un MBA, entraîneur professionnel, Christophe Clavé a passé 25 ans en entreprise, en tant que DRH puis Directeur Général. Il a également été chargé du cours Stratégie et Politiques d’Entreprise à HEC Paris pendant 5 ans. Actuellement Président d’une société d’investissement, il est également associé au sein du cabinet Alturion, un Groupe de Conseil en Ressources Humaines dont le cœur de métier et la raison d'être sont la recherche de talents, leur recrutement, et dont il contribue au développement. 

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Arlette Thomachot | 06/02/2022 22:38

Cette tribune est mon credo!

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