Le samedi 4 mai aura lieu le chapitre annuel de la Confrérie des amateurs de Sagarno de la Bidasso au fronton de Biriatou.
Beaucoup se posent la question : qu’est-ce qu’une confrérie ?
Pour faire vite, simple et facile à comprendre (1), on pourrait dire que c’est une association loi 1901 d’intérêt général, sans but lucratif, qui a une gestion non intéressée, qui agit dans un cercle de personnes non restreint. Ceci est le cadre de fonctionnement général.
Des confréries comme la nôtre, il en existerait 1500 en France. A l’heure actuelle, plus de 300 sur l’hexagone et 11 au Pays Basque, dont la nôtre, sont reconnues au Patrimoine Culturel et Immatériel en France, et figurent sur la liste que nous présentons auprès de l’Unesco pour prétendre à une reconnaissance au patrimoine de l’Humanité.
Le dossier est en cours, il est porté par notre Ambassade confrérique de Nouvelle-Aquitaine avec l’appui et le mandat de l’ensemble des régions confrériques de France regroupée en Fédération (FCRF). C’est dire l’impact mondial de ce que nous défendons, chacun dans notre proximité d’abord et qu’au-delà si possible, nous faisons connaître. Redonnant ainsi des lettres de noblesses au bien manger, aux produits de qualité, de proximité, en respectant leur saisonnalité. Avec un petit regard en arrière sur les bonnes recettes de nos parents et grands-parents, qui savaient nous régaler avec des produits simples, frais, pas chers, mais bien accommodés. Nous nous revendiquons de l’œno-gastronomie, l’Art de vivre et des Traditions.
Notre confrérie s’évertue ainsi à vulgariser auprès de ses membres, des jeunes et des moins jeunes, tout ce qui touche à la pomme et au sagarno : Cette boisson emblématique des basques que les Romains (2) avaient repéré dans notre façon de vivre. Ces pratiques d’économie familiales et locales qui ont perduré jusque dans les années 50, ont décliné avec les changements générationnels qui ont suivis. Ce fut aussi le cas pour le vin et la bière qui étaient réalisés dans le cercle familial.
Nous réapprenons à faire notre Sagarno, notre jus de pommes, à ne rien perdre en faisant notre propre de vinaigre sagarno, notre confiture de pomme pressées. A être autonome et à planter ainsi des pommiers greffés pas nos soins. C’est une démarche collective, ouverte, bénévole, non intéressée, inclusive et en plus agréable
Manolo Alcayaga Goikoetxea
(1) Je n’oublie pas notre filiation aux constructeurs de Pyramides, à l’époque romaine, aux temps des cathédrales, jusqu’en 1791 ou les confréries ont disparu par la fameuse loi LeChapelier qui interdisait tous types de regroupements. Pourtant les confréries de métiers, de type de commerces étaient des éléments essentiels d’une société qui organisait par filières, professionnellement, mais aussi humainement pour mettre en place les aides et entraides nécessaires auprès des accidentés de travail ou de la vie. De porter au secours plus nécessiteux
(2) Au siècle Ier, Strabon signalait dans ces écrits la culture de la pomme et la transformation de son jus en boisson alcoolique dans le golfe de Gascogne.
Dès 1189, apparaît dans le Labourd le premier règlement écrit en France sur les pommeraies, et d’autres documents, ordonnances et décrets royaux du Royaume de Navarre sur les pommiers et le cidre.
D’Adam et Eve au Txotx basque
Adam et Eve chassés de l’Eden par l’orgueil de cette pomme croquée à pleines dents regretteront toujours les jardins de Dieu au symbolisme peint sur les poutres de la Maison de l’Infante. Qu’il soit originaire des Hespérides ou du Caucase, le fruit remonte son histoire aux temps les plus reculés d’où surgit le vocable archaïque « Sagar » (pomme, en basque) qui fournit jusqu’à maintenant tant de noms de lieux ou de maisons.
Car voilà mille ans et plus, les pommiers fleurissaient dans les abbayes de Roncevaux et d’Urdax ainsi qu’à Bayonne (déjà célèbre sous les Romains pour ses langoustes et ses jambons autant que pour le cidre), participant à la prospérité de la ville et objet d’un protectionnisme jaloux suscitant au moyen-âge de sanglantes rivalités avec le pays alentour. Ils font encore la renommée du cidre basque, à en rendre la Normandie jalouse !
Victor Hugo ne se satisfaisait-il point, pour son déjeuner d'un cidre à Pasajes, bien avant que ne s’impose la mode du Txotx si répandue de nos jours ?
Lorsque notre grand anthropologue Joxemiel de Barandiaran recueillait les us et coutumes de notre pays avec son langage avant qu’ils ne se perdent, il notait :« Dans certaines maisons on fabrique aussi du cidre. Son nom est sagar-ano. Dans un gransd pétrin de bois on écrase les pommes en les tapant à l'aide de masses de bois. Ensuite elles sont pressées (tinkatu) dans une machine appropriée. On met le jus ainsi obtenu dans une barrique où il fermente ». Les moines prémontrés en produisaient à Urdax pour l’exporter par bateau depuis le port d’Ascain vers Saint-Jean-de-Luz (avec l’acier fabriqué dans leur forge).
Et à Bayonne, les premiers livres de compte de la pépinière Maymou indiquent la vente au Pays Basque de pommiers à cidre de Normandie et du Centre de la France…
Et à l’ombre du château d’Abbadia, le verger – qui est une antenne du conservatoire végétal régional d’Aquitaine basé à Montesquieu (Lot-et-Garonne) - produit des pommiers autochtones du Pays Basque.
ALC