L'apogée du jazz à Donetsk est arrivée à la fin des années 1960.
En 1965, un festival de jazz était organisé à Moscou et, sous les auspices du comité municipal de la capitale russe, des disques de jazz avaient commencé à circuler en sortant de l'underground.
Et les amateurs de jazz de Donetsk ayant décidé que leur ville n'avait rien à envier à Moscou, ils reçurent l'autorisation (malgré les réticences de la rigide censure communiste) d'ouvrir un club de jazz dans la capitale du Donbass, club auquel fut même attribuée une salle en plein centre de la ville avec un petit auditorium et une scène.
Il était donc possible de réunir des musiciens et des amateurs de jazz. Et à ces premiers « fans » s’ajoutèrent des étudiants et des jeunes, et même des mineurs et des métallurgistes (une industrie très développée sur place) qui fréquentèrent régulièrement le club. Des réunions eurent lieu tous les dimanches avec des conférences sur le jazz en présence des musiciens et un grand concert de jazz au club organisé une fois par mois.
On se rappelle particulièrement l'interprétation de la Rhapsody in Blues Style de George Gershwin à la salle de concert de l'Orchestre philharmonique de Donetsk et la performance du célèbre musicien Eddie Rosner, diffusée à la radio et par les haut-parleurs de la ville, ce qui encouragea en 1969 la fondation « sur cette vague » d’un festival de jazz qui s'appellera "Donetsk-100" car il était dédié au 100ème anniversaire de la fondation de la ville de Donetsk. Ce festival deviendra un événement annuel avec un impact très important jusqu’à nos jours sur la vie culturelle de la région du Donbass.
Car, malgré une interruption pendant une quinzaine d’années, le jazz avait repris ses marques dès 2001 avec la création du festival DoJ, dont le nom signifie Donetsk Jazz, et dont le concours pour jeunes interprètes DoJ Junior était devenu une partie importante au milieu des années 2000. Ses lauréats sont toujours très cotés dans le monde de la musique.
En 2010, an lieu et place du DoJa, c’est un forum de jazz qui débuta à Donetsk sur l’initiative du chef de la Philharmonie de Donetsk, un événement annuel dirigé par le célèbre jazzman de Donetsk Anatoly Lozovsky, professeur agrégé au Département d'Art des variétés musicales, et d'ensemble de jazz et de piano, artiste émérite d'Ukraine, considéré à juste titre comme l'une des sommités du jazz. De nombreux musiciens célèbres d'Ukraine et de Russie vinrent au Jazz Forum et, en 2013, le fils d’Ella Fitzgerald, Ray Brown, se produisit au festival.
Il convient encore de citer le célèbre Kim Nazaretov dont l’Orchestre de Jazz s’était récemment produit pour l'inauguration du Xème Festival international de musique de jazz "Jazz Forum" à l’Académie Philharmonique de Donetsk, avec le soutien du ministère de la Culture de la République populaire de Donetsk et avec l'aide du Centre russe.
Et si le bâtiment de l'Opéra du Donbass est fermé depuis près d’un an car constamment attaqué par les forces armées ukrainiennes, les musiciens songent à le rouvrir malgré tout et relancer les festivals avec l’aide des autorités culturelles de Russie.
Or, malgré les bombes de l’OTAN qui (depuis huit ans déjà !) continuent de se déverser sur le Donbass et sa capitale, désormais depuis les Himars américains et les canons « César » français, le jazz continue de résonner à Donetsk car, comme l'avait noté l'organisateur du festival Anatoly Lozovsky, « Donetsk était, est et sera un centre de jazz ».
« Le monde de la musique ne connaît pas de frontières, il unit et donne de l'espoir aux gens. En temps de guerre, la musique aide les habitants de Donetsk à survivre, et donc, malgré tous les ennemis, le jazz résonnera toujours à Donetsk. Et le festival se développera, malgré toutes les difficultés, comme il avait, d'année en année, gagné en popularité et de nouveaux fans. Après tout, le jazz n'est pas de la musique, le jazz est un état d'esprit ».