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Noël 2023 à l'heure de la guerre à "Béthléem-Gaza" en Israël
Noël 2023 à l'heure de la guerre à "Béthléem-Gaza" en Israël

| François-Xavier Esponde 1251 mots

Noël 2023 à l'heure de la guerre à "Béthléem-Gaza" en Israël

Greccio, l’endroit où tout a commencé à Noël 1223.jpg
Greccio, l’endroit où tout a commencé à Noël 1223 ©
Greccio, l’endroit où tout a commencé à Noël 1223.jpg

Une émotion étrange envahit le cœur en cette Noël 2023 en pensant à la guerre en cours en Israël où rien de ce qui fait penser à la naissance de l’Enfant Dieu ne disparaît de la mémoire et de l’actualité.
Bethléem est vide de pèlerins et de visiteurs, et le déroulement de la guerre en cours ne laisse entrevoir de trêve prochaine.

Il y a 800 ans à Greccio en Italie, munis de torches et de cierges de cire de miel, des fidèles fendent la nuit du 24 décembre à minuit pour célébrer ce culte inattendu à la grotte du lieu autour d’un enfant langé dans une crèche, un bœuf et un âne, et de pauvres parents qui s’émerveillaient d’une naissance hors les canons autorisés des bienséances habituelles.
Nous ne sommes plus en terre de Palestine-Israël, mais en Italie !

Et de cette innocence quasi-puérile naquit l’idée de recréer une crèche vivante en un lieu isolé et retenu de la naissance de Jésus, l’enfant attendu qui traversa le cours des huit siècles jusqu’à nous.

La mémoire italienne de cette naissance avait déjà inscrit sur un bas relief de sarcophage au IVème siècle à la basilique Saint Ambroise de Milan, une représentation sommaire de la naissance d’un nouveau-né que l’on qualifia sans doute de légendaire dans l’art et l’entendement de cette époque.

Seuls les Evangiles ayant droit de cité chez Luc et Matthieu de cet avènement, l’imagination débordante eut cependant libre cours au Moyen Age pour réécrire l’histoire des humbles et des minores, plus proche que celui des doctes et des pédants en la matière des sources historiques de cette naissance.

Jacques de Voragine se complut dans ces récits légendaires et des acteurs de mystères médiévaux aimèrent adopter la représentation théâtrale de l’hiver pour fixer la crèche dans le temps et la liturgie de l’Avent et du temps de la promesse messianique.

La sobriété du décorum, pour le moins austère et dépouillé, semblait à son zénith, mais l’afflux des curieux et des visiteurs incita sans délai à étoffer le paysage de la crèche de tous ces corps de métier, menuisiers, boulangers, charcutiers, cuisiniers, lavandières, pâtres et de ces animaux de ferme familiers de la vie commune qui y trouvaient in situ leur place et leur vocation.

La vie était célébrée candidement, naturellement, écologiquement, diront certains aujourd’hui, sans fard ni vantardise.

En quittant l’église et ses usages stéréotypés d’époque, les personnages de la crèche s’enrichissaient de figurants de gens du pays, le peuple dans sa simplicité, les quidams de tous les temps invités comme les souverains et seigneurs à prendre place avec les premiers personnages de l’histoire sainte, Jésus, Joseph, Marie, et l’âne qui réchauffe le cœur de ces auteurs !

On trouva sans doute par la suite le décor de scène de la crèche rudimentaire avant de décider le retour à l’église même de ces acteurs de la Sainte Famille, comme rapporté à Prague en 1562 d’une première crèche démontable de grande dimension.

Il fallut suivre l’intuition géniale de Francesco d’Assise, mais l’améliorer sans doute, la rendre plus sociable et conventionnelle aux populations de toutes origines qui ne se limiteraient plus dans leurs rangs que des bergers, des moutons, et des ânes de somme, mais compteraient des gens honorables de la vie citadine urbaine attachés à la Nativité de Jésus.

A la fin du XVIIIème siècle, la Révolution française fit le ménage comme en d’autres cas sur ce que tout cela pouvait laisser penser de superstition et de magie obscure sur le peuple souverain déjà nourri de l’opium des suffisants !

On décida en moult lieux de dévotion de supprimer ces crèches rangées ou détruites : à Paris la célébration du 24 décembre sera interdite, mais qu’à cela tienne aux cuistres de séant, les Parisiens décidèrent d’imaginer des crèches domestiques à l’envie.

Et la culture de la crèche changea quelque temps de visage, avant de retrouver le moment venu un apaisement des esprits et l’usage libre et cultuel de l’imaginaire dans les édifices religieux, les couvents et les institutions scolaires.

Dans la partie nord de la France et en terre réformée, on ne semblait guère convaincu du bien-fondé de ces cultes particuliers de la Nativité. On trouvait “ces cultes folkloriques” : on ne les empêchait pas, mais leur caractère si peu biblique semblait un divertissement faute de mieux !

Plus au nord, en Suède, terre protestante, on attendit le début du XIXème siècle et la venue de traditions catholiques dans le royaume pour ajouter des lutins et des santons venus du Sud de l’Europe à ce paysage de Noël imaginaire. Pourquoi pas ?

Mais la tendance innée et native de la crèche et de ses personnages pléthoriques au fil des siècles s’enrichit de santons provençaux et italiens faisant croire en somme que Jésus était bien provençal ou italien de naissance ?
Loin de Bethléem et si près du cœur de chacun dans sa culture, ses origines et ses traditions !

L’ingéniosité, l’invention, la richesse des figures étant telles que même les incrédules et les mécréants les plus assurés durent concéder que ces personnages avaient du sens, pas le leur, mais pour des fidèles en quête de langage et de message pour aujourd’hui.

La technique moderne y ajoutant musiques, instruments, décors mobiles et jeux scéniques, on se prêtait donc au jeu des rôles où figurants et figurés s’échangeaient entre eux leur statut ou leur mission !

Appelant le tout “folklore ou arts populaires“, on s’enquit de ne traiter la somme de négligeable, de créer des musées ou de vrais conservatoires artistiques en argile ou en carton-pâte pour sceller l’évènement à l’échelle universelle sans parti pris ni désignation officielle.

Par suite, Greccio prenait sa revanche et se conformait aux goûts du temps avec le sapin, les marchés de Noël, et les jeux de glisse de l’hiver. Devenus objets de réprobation des uns aujourd’hui, litiges de peccadilles des autres, on compterait le nombre de sapins sacrifiés par la main scélérate des adulateurs de Noël par ces innocents peu soucieux de sobriété énergétique et de durabilité de la forêt ! Avouez que la question ne se pose pas en ces termes dans les massifs pyrénéens, bien pourvus de tels résineux et résistants pour de nombreuses années encore aux Noëls des facétieux !

Les libertins voulant en découdre avec les conformistes, les laïques avec les mystiques, et les nostalgiques avec les modernistes, la crèche arborait tous les visages du temps présent.

L’imagination en la matière étant des plus délurées, on prétendra que le bon et le mauvais goût pouvant se croiser, on laisserait à chacun le soin de faire commerce de ses privilèges et de ses préférences !
Une madone de la crèche devenue une égérie de halloween, un Joseph croisé en lutin de manège de fête foraine, avouez on put faire mieux ! Mêmes les irréductibles de la révolution silencieuse de l’anti-christianisme avaient de l’imagination et de la drôlerie.

La Nativité de l’Enfant Dieu aurait gardé un charme oriental inné. Seule ombre au décor de lumière de ce jour, le destin actuel de la guerre assombrirait en Terre Sainte le paysage de cette naissance de lueurs rouge-sang si peu amènes pour ce temps d’allégresse universelle.

Bethléem ou la maison du pain souffrant de tant de menaces guerrières qui pétrissent tant de rancœurs et de haines en Israël ce jour.
Ne les oublions pas. Cette guerre est aussi la nôtre, et la leur. Celle du défi de la Paix inachevée de l’histoire de l’Orient de nos origines spirituelles d’une nation victimaire ! Il nous faut nous en convaincre encore.

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