1 - De la Grèce à l’Italie
On se souvient de ces dates répertoriées du calendrier latin, les Meditrinalia du 11 octobre ou la fête des vendanges de l’année placées sous le patronage de Jupiter et de Vénus comme les suivantes.
Le travail de la composition faite à partir du moût, de la première version liquide obtenue et des différentes transactions pour mélanger le vin vieux au vin nouveau et invoquer la bénédiction des dieux. Ce faisant correspondre aux obligations religieuses semblaient datées mais elles demeuraient !
On avait célébré au préalable dès le 23 avril les Vivalia priora ou la fête du vin nouveau au prix de sacrifices d’agneaux destinés à Jupiter et à Vénus.
Ces vendanges inaugurées dès le 19 août au cœur de l’été Vivalia Rustica !
Dès lors le vin et les religions se sont unis dans l'histoire en des rites et des cultes inséparables.
Pour les mondes grec et latin, ce culte appartenait à leur culture.
Les auteurs citent les Mystères de Dionysos qui engendrèrent en Grèce le goût du théâtre, on y célébrait le produit de la vigne et le pouvoir de la parole de les célébrer ensemble.
Les Romains, héritiers de ce monde plus ancien que le leur, adopteront Bacchus dans leur monde dont suivront les bacchanales, des rites et pratiques tournées vers les divinités de la terre ajoutant des orgies et des débordements qui faisaient peur aux chefs de la cité tant les conduites à risques de la population menaient aux excès de toutes espèces, alimentaires et péri alimentaires, comprenez ouvrant la voie à l'outrance !
2 – Le vin présent dans toutes les cultures et religions de la Méditerranée
Héritiers de ces us et coutumes on rapporte selon les chroniqueurs chrétiens que "l'union sacrée au sang de Dieu" avait un relent de paganisme et qu'il fallut des siècles pour humaniser ces outrances saisonnières situées autour des bacchanales. Elles se répétaient hors des dates de ces cérébrations !
La tradition juive plus ancienne que la tradition chrétienne rappelle “vin objet de sacrifice à Dieu et signe de bénédiction de Dieu pour les hommes.”Somme toute une version de Jupiter différente !
Chez les musulmans dans le temps ultérieur de leur histoire le vin signait un sentiment d'attrait et de répulsion, de récompense pour les élus promis à l'éternité mais il fallait attendre pour obtenir cet accès à l'immortalité que les plus pressés trouvaient un peu lointain dans leurs modes de vie !
Aucune religion du monde recensée à ce jour, védique, en Arménie, en Phrygie, en Syrie, en Arabie, en Inde, en Egypte, en Babylonie, en Grèce, chez les Etrusques, en terre latine et en Gaule ne semblait insensible aux bienfaits de ce nectar produit en ces chaudes contrées de la Méditerranée.
Les bienfaits des uns faisant place à la Résurrection et au goût d'une éternité de la promesse, par le biais de toute ivresse...
Célébré dans sa prose dès 734 avant notre ère, Dionysos ne privait pas les auteurs de ses Mystères des réjouissances contenues dans son théâtre.
On disait cependant que la qualité de ces vins ne ressemblait guère à celle des vins d'aujourd'hui : un jus de raisin acide et vinaigré de durée courte dans la conservation, un succédané de vin mélangé à la récolte précédente qu'il fallait boire comme une médication, faute de mieux, et d'une qualité rudimentaire.
La célébration du vin nouveau conviait à “la cohésion sociale car le peuple en quête de pain et de jeu ne rechignait à le consommer en ces ivresses passagères d'un confort assuré !”
Pour le cas, on libérait les prisonniers conviés aux aussi à ces libéralités - mais de courte durée !
Les Dionysies duraient de trois à cinq jours, sur le calendrier romain, un laps de temps court, mais gratifiant !
Les empereurs romains craignaient cependant qu'à l'issue de ces festivités le peuple ne se rebelle, par la libération des contraintes et l'extension des mœurs sans retenue, dans un brassage social généralisé où les appartenances sociales se défaisaient, mêlant à la fête tout un chacun, quel que fut son rang et la teneur de son sang !
Les femmes, à leur tour rendues libres de leurs ébats, accourraient au Tibre, munies de torches allumées où, disait-on, la licence l'emportant sur les bonnes manières, on croisait des notabilités de la ville s'encanaillant avec leurs nouvelles amitiés d'un soir. Tel était le bienfait du vin qui ragaillardit l'humeur des hommes et attisait l'attirance des femmes
On décida cependant un jour de 186 avant JC de mettre un terme à la démesure, un interdit levé un siècle et demi plus tard par l'Empereur César qui comprenait que “trop de règles tue la règle, et lâcher l'étreinte canalise la passion !”
Le vin demeurait l'objet culte des sacrifices rendus aux divinités, parmi les sacrifices animaux qui pouvaient les accompagner, cités comme « sponde » dans la langue latine, dans le breuvage ajouté composé de lait, d'huile d'olive et de parfums d'herbes aromatisées...
Il se dit que dans les Balkans, encore aujourd'hui, les prêtres orthodoxes au fait de leurs traditions millénaires arrosent la sépulture des disparus de ces boissons sans y voir pour le fait une quelconque incongruité ni infamie le jour des funérailles.
Par 443 fois, la Bible - dans la Torah ancienne comme dans les Evangiles - cite le vin comme signe de bénédiction divine pour tous les signes obtenus pour le peuple de l'alliance par le raisin fermenté et sa consommation imposée au fidèle afin de témoigner à... l'Eternel de la gratitude pour ses magnanimités !
Dans quelque texte apocryphe, particulièrement présent dans ce monde oriental, il se raconte que le démon eut l'idée de créer à côté du Jardin de la Genèse du monde originel un autre jardin, habité par d'autres espèces animales et végétales, y célébrant le culte du mouton, du lion, du singe et du cochon !
Une offense scélérate que celle d'avoir osé supplanter l'Eternel dans sa mission. Satan en était l'auteur, il fallut le punir d'avoir commis l'irréparable, terre et ciel furent perturbés, le ciel se vengea, les orages et la tempête sévirent, le peuple de l'alliance se retourna vers son auteur.
Dieu n'étant plus le maître souverain de la Création, il fallut revenir à lui pour apaiser sa colère et restaurer sa force.
Le vin occupe toujours une place de choix dans la Hallaka juive, lors du Sabbah, et dans la Pâque juive. On remit le vin à sa place, l'Eternel accomplit sa bénédiction du repas des fidèles, ainsi les principes religieux des fils d'Israël furent observés pour les générations comme le demandaient les rabbins dans l'exercice de leur mission !
Ce vin venait du Liban et des pays alentour, disent les chroniqueurs, de ces terres étrusques anciennes exercées à le produire pour eux et le faire transiter jusqu'à Jérusalem. Et l'on rapportait la formule de bénédiction attachée au rite : « Loué soit le Seigneur notre Dieu, roi de l'univers, créateur du fruit du raisin » !
Le doute était levé et l'Eternel, reconnu dans son rôle par les enfants de la promesse.
Ne pas boire le vin, refuser de le faire, était taxé de renoncement à Dieu et une apostasie possible, sévèrement jugée par les rabbins qui assimilaient de la sorte ces rebelles à des sectes juives ou non juives qui imposaient à leurs fidèles l'interdiction de faire commerce de vin pour leurs cultes et leurs consommations.
On préjuge en effet que le prétexte du vin servit aussi à pratiquer des polémiques entre juifs et chrétiens, à son propos, non de toute évidence pour son usage mais le sang induit à ce nectar que les chrétiens considéraient comme sang du Christ, insupportait un Israélite, pour qui le caractère sacré du sang appartient à Dieu et ne peut faire l'objet d'un échange avec l'homme.
L'histoire commente la dispute de Carpentras (en 1444), bien de chez nous, interdisant aux chrétiens “de consommer le vin fabriqué par les Israélites, et aux Juifs de boire ce vin venu des caves des chrétiens ?”
Selon toute raison, une chicaia comme on les aime sur ces sujets rabelaisiens, devait s'en délecter en son temps pour les pourfendre.
L'histoire ne dit mot sur la méthode de vinification selon les interdits religieux employée chez les uns et les autres qui de toute évidence était d'un avis plus justifié que de savoir si le vin juif des uns et chrétien des autres pouvait exister hors de l'imaginaire de leurs auteurs !
Les textes écrits racontent que ce picrate était assez médiocre et portait le nom de vin, qui aujourd'hui serait déclassé en vinaigre de cuisine de moindre qualité.
Lors des épidémies si macabres de l'histoire passée, on raconte que des religieux firent célébrer des messes chrétiennes à Dionysos, dans ces contrées méditerranéennes où son culte faisait florès, pour chasser le virus de la peste noire.
L'histoire ne dit mot sur une telle efficacité !
Dionysos en avait-il le pouvoir, ce qui laissait penser que son culte fut longtemps présent dans les populations méditerranéennes et qu'il fallut invoquer les autres saints chrétiens, Marc, Vincent, Vernier, Morand, issus d'un florilège de saintetés locales, pour protéger la vigne pendant l'été, épargner la grêle et les tempêtes, favoriser les récoltes, et réclamer la clémence du Ciel pendant la maturation du raisin !
Les statues de saints dont les vertus n'avaient fait la preuve de leur efficacité pouvaient être jetées dans des puits ou retournées dans les églises, dos au fidèle, la tête côté mur, pour leur demander diligence et réparation.
Ce furent les papes - propriétaires avec les moines et les abbayes de grandes exploitations viticoles - qui au delà du XIVème siècle, en France et en Italie, développèrent les terroirs et "les premières appellations de vin" dont l'évocation attise le palais des gourmets et des fins dégustateurs de nos vieilles terres à vin européennes !
Le pape Clément VI avait prévu trois parcelles de vignes pour ses usages, ceux du pape, ceux des moines, ceux du roi, car dans les vignes du Seigneur Dieu, chacun avait ses parts et ses prébendes !
“Vieux je bois du vin nouveau, par le vieux vin je guéris une maladie nouvelle”, disait une sentence latine exercée de toute évidence selon la pharmacopée de l’époque !