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Tradition
Le Baptême du Christ
Le Baptême du Christ

| François-Xavier Esponde 967 mots

Le Baptême du Christ

1 – Le génie de la peinture italienne.

De l’Orient à l’Occident, cette fête du Baptême du Christ revêt des traditions spirituelles différentes issues des diverses traditions religieuses.
Les Orientaux parlent du Baptême du Seigneur ce 6 janvier prochain, ou de l’Epiphanie ou manifestation humaine du Christ Fils et Seigneur de l’humanité.
Les Occidentaux ont rapporté cette épiphanie première à la Nativité de Jésus - ce Dieu qui sauve -en décembre, lors du solstice de l’hiver, et adopté les légendes épiphaniques issues du protévangile de Matthieu sur l’arrivée des trois rois mages à Jérusalem venus adorer l’Enfant-Dieu né dans une mangeoire..

Nous sommes dans l’Orient originel. Le récit apocryphe a ses racines, qu’importe la véracité des temps, des lieux et des origines, la magnificence de l’événement transcende la rationalité occidentale à laquelle répond la quête des preuves observables, là-même où l’attestation des premiers témoins fait l’objet de croyance et d’adhésion.

Le Baptême du Christ n’a cessé de fasciner l’âme des peintres italiens au fil du Moyen-Âge. Le tableau du Baptême du Christ réalisé autour de 1440 par le peintre Piero della Francesca fait partie d’un panneau représentant un ensemble iconographique démembré au cours du temps et contemplé comme le chef-d’œuvre d’un peintre considéré comme l’un des maîtres fascinants du Quattrocento.

Réalisé pour l’église du couvent des Camaldules de Borgo San Sepolcro, le tableau constitue le centre du retable d’où les représentations de saints, comme saint Jean Baptiste et les Docteurs de l’Église, furent déplacés de l’original.

On cite le peintre Piero della  Francesca comme un mathématicien, maître dans l’art de la composition de ce retable à destination monastique d’une œuvre aux contours harmoniques et jugée d’une qualité parfaite.

Les commentaires attachés à l’étude artistique de sa peinture évoquent “l’harmonie chromatique et lumineuse, tout en subtilité qu’ils qualifient cette œuvre comme étant l’un des sommets de la pittura di luce” dont le peintre serait l’un des meilleurs représentants.

Florence au XVème siècle développe “les effets nuancés des accords chromatiques et l’unité donnée par la lumière pour obtenir d’une manière claire cette vision dans laquelle les couleurs s’emperlent de lumière et la perspective devient un spectacle pour les yeux“.

Une splendeur magnifique !

L’artiste invite à prolonger ce regard introspectif sur le Christ au Centre.
Derrière la simplicité et le dépouillement d’une composition frontale, la mise en scène est toute étudiée dans le détail par le peintre.
Ce corps de christ dévêtu, portant un voile autour des reins ordonne tout, aux trois anges figurants hiératiques dont Jean le Baptiste à droite,  derrière ce dernier, sur le chemin que dessine le cours d’eau, un néophyte se préparant à recevoir ce baptême et un groupe d’hommes accoutrés en train de discuter.

Tous les éléments réunis dessinent une rigueur géométrique accordée au centre de la peinture.
Les historiens de l’art comparent ce travail aux rapports musicaux que prônait l’architecte Alberti, l’octave, la quinte, et le quarte qui se répondent en peinture.
Piero della Francesco était un excellent mathématicien : auteur de plusieurs traités de perspective, le peintre dessine une musique des proportions, dont le corps du Christ est la mesure à qui de nombreux savants se sont employés à donner les détails de leurs travaux.
“Par exemple, le torse du Christ est inscrit dans un cercle dont le diamètre équivaudrait au quart du diamètre des deux grands cercles qui constitueraient l’ensemble du panneau...”

Les historiens de l’art témoignent de cette remarquable unité iconographique mais s’interrogent sur la présence de ces personnages à droite et à l’arrière plan.
Qui sont-ils ?

2 – La mathématique inspire la théologie.

On pense que certains points de théologie discutés lors des Conciles de Ferrare en 1438 et à Florence en 1439 ont fait l’objet de l’inspiration du peintre qui a enrichi de ces témoins venus d’Orient et de l’Occident leur contribution à la théologie trinitaire.

Ces trois anges seraient les figures de la Trinité et de la Concorde entre les églises d’orient et d’occident, objet de nombre de discussions tumultueuses, à qui les personnages du fond de scène associeraient la participation des Pères conciliaires grecs, reconnaissant un seul et même Baptême du Christ, en professant le credo du filioque, par la représentation de la colombe de l’esprit saint, procédant et du Père et du Fils..

Nous sommes assez loin des rois mages qui sans doute sont davantage saisis par la Trinité Une et Sainte de la foi chrétienne, par delà les différences d’interprétation propres à chacune des églises chrétiennes ?
Telle est l’intention du peintre de toute évidence !

Nous sommes encore en Orient, bien que présents dans l’Eglise romaine professant la Trinité de la contemplation du Sacrement du baptême du Christ, célébré par l’orthodoxie comme l’Epiphanie du Seigneur..
Ce néophyte qui retire son vieux vêtement se rapproche du baptême pratiqué de la part des adultes pendant des siècles.
Ce rite impliquant une forme de nudité complète comme rappelé par Paul de Tarse : “vous vous êtes débarrassé.de l’homme ancien et vous vous êtes revêtus de l’homme nouveau“ Col, 3, 9-10.

Le sujet de réflexion obtint la faveur de nombreux théologiens de ces origines du christianisme : Cyrille de Jérusalem, Grégoire de Nazianze, Jean Chrysostome, Augustin d’Hippone en avaient fait eux mêmes l’expérience spirituelle lors de leur conversion au christianisme.

Le psaume 51 rapporte encore ce désir, “lave moi tout entier de ma faute, purifie moi de mon offense, purifie moi avec l’hysope,et je serai pur, lave moi et je serai blanc, plus que la neige” - Ps 50, 4-9.

En contemplant ce tableau du Baptême du Seigneur Jésus, laissons aller notre regard à la profusion de grâce spirituelle que l’auteur sublime de ce retable a voulu faire partager à ses admirateurs, inspirés d’Orient et d’0ccident, qui deviendront des chrétiens habités du mystère de la foi christique.
... Les artistes en prolongeront la portée spirituelle pour l’humanité entière !

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