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Tradition
In Memoriam : deux hazpandar, Maurice Driollet et François Garat, le chêne de Celhay
In Memoriam : deux hazpandar, Maurice Driollet et François Garat, le chêne de Celhay
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| François-Xavier Esponde 1000 mots

In Memoriam : deux hazpandar, Maurice Driollet et François Garat, le chêne de Celhay

Il ne se passe pas de semaine, hélas, sans que l’Eglise de notre diocèse basco-béarnais ne connaisse le départ de quelques prêtres vers la Maison du Père. Fort heureusement, une nouvelle génération de jeunes prêts d’embrasser une vocation religieuse surgit du nouveau séminaire inauguré voici quelques années par Mgr Aillet : la récente messe du 10ème anniversaire de son ordination épiscopale et le verre amical qui suivit réunit une nombreuse et enthousiaste « société juvénile » autour de l’évêque de Bayonne. Pour sa part, l’abbé François-Xavier Esponde revient sur quelques riches trajectoires religieuses qui viennent de s’achever. ALC

François Garat naquit à la Maison Lorda sur le flanc de Celhay adossé à l’Ursuya, à Hasparren. Il était attaché à sa terre natale où il avait voulu se retirer un jour.

Mais la providence en avait décidé autrement.

Né en pleine guerre en 1944, le jeune séminariste fit des études à Bayonne, puis à Rome, qui le destineront à l’enseignement au séminaire de Dax au cours de la première étape de sa vie.

La vie paroissiale et pastorale du diocèse le rappelle à Armendaritz pour s’occuper de l’animation des « Chrétiens dans le Monde rural » où il sera apprécié pour son intelligence des situations et la connaissance des hommes.

Un passage dans la capitale française lui fera continuer ses études tout en assurant l’aumônerie des Basques de Paris pendant un an.

François Garat se chargera par la suite, successivement des paroisses d’Espelette, Saint-Pée-sur-Nivelle, Saint-Jean-Pied-de-Port, au fil d’une vie ecclésiale rythmée par les évènements du Pays Basque. Car il n’était un secret pour personne qu il aimait sa terre d’origine, sa culture et son église avec la fougue juvénile de son tempérament authentiquement basque. Un homme d’une envergure forte, de dimension large et d’engagement sans réserve.

Les camarades du rugby de ses jeunes années à Hasparren connaissaient l’engagement sportif d’un joueur coriace qui savait recevoir les coups et les rendre si nécessaire. La montagne fut aussi sa passion secrète. L’Ursuya ne pouvant satisfaire son goût de dépassement physique, il ira vers des cimes plus élevées. Ses camarades de cordée se souviennent que son endurance le conduisait vers les sommets avec l’aisance d’un passionné des altitudes et des défis physiques, d’un athlète qu’il était et demeura jusqu’au bout.

Tous les ans, le lundi de Pentecôte,  on le voyait monter à pied à Notre-Dame de l’Aubépine à Ainhoa, sac au dos, chaussé comme un montagnard, fougueux et ardent pour rejoindre la chapelle par des chemins escarpés depuis Espelette jusqu’à Ainhoa.

François Garat avait du caractère. Il lui en fallut car les évènements de sa vie furent riches comme son esprit. La routine et les habitudes n’étaient pas dans ses usages.

La curiosité du monde et la connaissance des personnes incitaient son intelligence à croiser la culture basque de son temps avec un bonheur qu’il recherchait sans cesse : le théâtre basque, la langue, les sports, la pelote et le dépassement physique lui étaient familiers au prix d’une volonté dont il témoignait depuis sa naissance.

Doté d’une pudeur naturelle, il faisait peu état de ses émois et des émotions qui traversaient son esprit. Mais ceux qui lui étaient familiers remarquaient sa délicatesse et son sens de l’écoute branché sur la vie des hommes. Même ceux qui ne comprirent pas toujours ses engagements personnels saluèrent son courage et sa fidélité.

Le Chêne de Celhay s’est affaissé mais tant et tant de ceux qui purent jouir de ses qualités personnelles garderont le souvenir d’un homme droit, robuste et profond en amitié et dans sa vie. Agur zuri !

Maurice Driollet, prêtre âgé de 89 ans, s’en est allé vers le royaume de lumière.

Né à Hasparren en 1930, prêtre depuis 1954, il était originaire de notre diocèse.

Professeur de Lettres et d’Espagnol à Ustaritz, il connaîtra des générations d’élèves au Petit Séminaire avant de prendre en 1970 le chemin de l’Argentine comme prêtre « Fidéi Donum ».

Une expérience sacerdotale originale que l’abbé Olhagaray avait tracée pour cette nouvelle génération. Il sera prêtre à Résistencia, à plus de 1000 kilomètres de Buénos Aires, en pleine nature, dans un diocèse où les prêtres se comptent peu, les fidèles sont pléthoriques, et les conditions de vie spartiates. Qu’importe, souligne Joakim Jauregui, l’actuel curé de Cambo qui passera lui-même neuf années en Argentine, dans les missions de ce pays. Maurice Driollet y résidera vingt années, un séjour entrecoupé par un retour dans le diocèse. Il sera nommé curé de la cathédrale de Résistencia par l’évêque argentin, en pleine dictature des militaires.

En charge des séminaristes et de la formation des jeunes prêtres, l’homme est engageant, et aime son peuple de fidèles d’origine simple et pauvre : des « campesinos » venus de diverses régions, proches de la religion, et désireux, avec ces missionnaires, d’orienter leur vie de manière chrétienne.

Maurice Driollet fut pour nous un prêtre curieux de la diversité, et dont l’influence sur la jeunesse a développé le goût du dépassement et de l’aventure. Enseignant et animateur spirituel, il aimait éveiller des vocations pour la mission et la coopération : plusieurs disciples lui devront d’avoir perçu l’appel du large vers d’autres continents.

Mission à l’étranger, rencontre de la diversité des cultures, communautés de base amérindiennes, connaissance des traditions de ces populations autochtones, faisaient partie de sa vie. Il fut heureux pendant son séjour sur ce continent singulier, selon des lignes de pensée correspondant à la théologie pastorale du Pape François, ancien archevêque de Buenos Aires.

Un Basque d’ici et de là-bas qui s’en est allé de la maison de retraite de Cambo, après une vie passionnée et riche de rencontres. Maurice Driollet s’était inscrit dans les années 68-70 dans la trajectoire d’une jeunesse en quête de dépassement lors du Concile Vatican II, de la rencontre des Eglises du Monde qui faisait partie de la tradition ancienne du diocèse de Bayonne, par ses nombreuses vocations dispersées dans le monde, tels les Jésuites, les Pères Blancs, les MEP, les Missions Africaines, et des congrégations religieuses féminines qui apportèrent une saveur locale basque à la vie de l’Eglise Universelle.

 

 

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