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Tradition
Du vœu de Louis XIII au « dimanche des Basques »
Du vœu de Louis XIII au « dimanche des Basques »
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Du vœu de Louis XIII au « dimanche des Basques »

Comme une pause salutaire dans le ramdam estival avec ses vacarmes nocturnes et le battage médiatique des « people », l'Assomption introduit sa réflexion spirituelle.

Certes, comme dans tout le Pays Basque où nombre de paroisses sont consacrées à l’Assomption, la fête religieuse (célébrée le 15 août depuis la proclamation de Marie comme Mère de Dieu par le Concile d'Éphèse) correspond également en France à une double fête dynastique initiée par Louis XIII. Car, en 1638, après 23 ans de mariage, le roi et la reine attendent enfin un enfant, le futur Louis XIV. Louis XIII signe alors à Saint-Germain-en-Laye des lettres patentes plaçant le royaume « sous la protection spéciale de Marie, mère de Jésus ». Le 15 août de la même année, l'ensemble du royaume célèbre la consécration faite par le souverain à la Vierge, en lui remettant « sa Personne, son État, sa Couronne et ses Sujets ». Des processions en l'honneur de la Vierge et de la France ont désormais lieu dans tout le pays, chaque année, le 15 août.

François-Xavier Esponde en étudie la représentation artistique à l’époque de la Renaissance, particulièrement riche :

Depuis le Vème siècle où fut érigée à Jérusalem une église en l’honneur de Marie, que de tribulations pour cette mère qui connaitra les vicissitudes des écoles spirituelles pour lesquelles elle serait une déesse antique transfigurée, pour d’autres une figure biblique dans son essence et sa traduction.

Des siècles durant elle imposera sa figure aux théologiens et aux familles de pensée qui la découvrent sans cesse proche et présente au cours de l’histoire de l’Eglise avec des fortunes multiples par les congrégations religieuses qu’elle vivifie et nourrit de vie spirituelle.

Elle est ainsi la propriété des artistes et des poètes. Ses représentations par la peinture, la sculpture, les écrits mystiques, les gravures traversent l’histoire de l’humanité sous toutes les latitudes et sous les religions parfois éloignées de la transmission biblique primitive.

Peinte entre autre par Ambroglio Di Stefano dit « le Bourguignon » au cours du XVIème siècle, Elle est représentée comme « Couronnée de la Vie divine » pendant la Renaissance qui la vénère et la contemple comme l’icône de Dieu incarné, et porteuse de l’Enfant Dieu.

On devine la proximité artistique du peintre avec Léonard de Vinci, bien que selon les experts de la peinture de la Renaissance, Bergognone, refusa de se laisser assimiler par les maîtres régnant sur les Arts à cette époque ; avec son contemporain Jean Bourdichon, « il ne se laissa guère comparer aux peintres naturalistes, tout en préservant l’art des primitifs et des enluminures pour dévoiler l’art du sacré, en idéalisant la représentation de la nature » et en restant fidèle à sa personnalité au milieu d’auteurs renommés, tels Raphaël et Michel Ange, « en cour » et souvent mieux soutenus dans leurs travaux.

La peinture du Bourguignon représente Marie élevée au ciel par huit chérubins vêtus de jaune, couleur incorruptible et lumineuse. Présentée en espalier, l’armée des anges, musiciens et choristes, font penser au jour même de la Nativité en rendant hommage à la nouvelle Eve. Au-dessus de la tête, deux hérauts - anges en blanc - figurent les témoins de la résurrection, jouant de la trompette pour célébrer la fin des temps. Chacun peut s’identifier de la sorte à la femme, l’épouse et la mère portée par une couronne d’anges et donne de l’espérance à ceux qui croient, sans savoir sinon le souhaiter chaque jour. Cette peinture est ainsi proche de la vie quotidienne de tous ceux, gens ordinaires qui se reconnaissent en elle.

« Sois fidèle jusqu’à la mort », dit le Livre de l’Apocalypse (2,10), je te donnerai la Couronne de la Vie » ! Les artistes s’exposent dans leurs œuvres, leurs œuvres exposent leur vie intérieure en un dévoilement qui est un message d’éternité désirable et espérée. A l’Assomption - « Pâque de l’été », disent les orientaux - Marie délivre au cœur et à la raison un message divin, invisible et sublime ! (François-Xavier Esponde).

Saint-Jean-de-Luz

Pour la fête de l’Assomption, c’est encore aujourd’hui toute la ville qui accompagne la Vierge illuminée du fronton municipal en mémoire du Vœu de Louis XIII (ce mercredi 15 août à 21h, rassemblement marial au fronton municipal puis à 21h30, procession aux flambeaux par Karrika haundi - rue Gambetta - jusqu'à l’église Saint-Jean-Baptiste).

Abet, entre Puyoo et Lahontan

Mercredi 15 août, comme chaque année, à 7h45, départ de la Vieille Eglise (chapelle Saint-Jean-Baptiste de Puyoô - 300, rue de la Vieille Eglise) pour le pèlerinage à pied, vers le sanctuaire de Notre-Dame d'Abet, autour des porteurs de la Vierge dont l’original du XIVème siècle est conservé à Lahontan. Une très belle promenade de 7 km à travers champs, rythmée par les chants et prières des pèlerins, jusqu'à l’arrivée pour la messe de 10h30 à Abet (village de Lahontan). Ce pèlerinage vers la source miraculeuse de Notre-Dame d'Abet, au bord du gave de Pau, perpétue une tradition datant du XIVe siècle. Tous ceux qui le souhaitent peuvent pique-niquer sur place. Vêpres et procession, l'après-midi, à 16h.

Dans l’histoire

Antérieurement, et pour d’autres raisons, des festivités avaient lieu au Pays Basque, entre autres dans le village navarrais de Zugarramurdi près de Sare où les habitants processionnaient aux grottes le 15 août pour « tenter de faire disparaître les sorcières qui s’y réunissaient, leur curé répandant des poignées de moutarde afin qu’elles ne reviennent pas durant autant d'années qu'il y avait de grains de moutarde ».

Sans oublier une curieuse tradition qui avait pour cadre la Côte des Basques à Biarritz lors du « dimanche des Basques » qui suivait celui de l’Assomption : il s’agissait du bain de mer rituel des villages labourdins et bas-navarrais. Encore sous le Second Empire et jusqu’à la Belle Epoque, « Ils tombaient des montagnes par bandes, en costumes de fête et couronnés de fleurs et de rubans. Ils se répandaient dans ce qui n’était encore qu’un village et, précédés de fifres (txistus) et de tambourins, brandissant leurs makilas (bâtons ferrés), ils chantaient en se livrant aux danses les plus extravagantes ». Après quoi, nos Basques de l’intérieur dévalaient leur côte préférée et, arrivés sur la plage, se déshabillaient tous, hommes, femmes et enfants. Puis, se prenant par la main, ils formaient une seule ligne pour s’élancer, à un signal, au-devant de la vague - la chronique dit « en poussant des cris sauvages », sans doute des « irrintzinas » - et, après cinq ou six aspersions de ce genre, allaient s’étendre sur le sable et se sécher au soleil !

François-Xavier Esponde et Alexandre de La Cerda

 

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