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Tradition
Anne et Samuel dans le récit biblique
Anne et Samuel dans le récit biblique
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| François-Xavier Esponde 890 mots

Anne et Samuel dans le récit biblique

Anne, « Anna » dans notre langue, est un prénom usuel bien situé et daté dans la Bible qui en rapporte les filiations.

Mais l’histoire d’Anne et de son fils Samuel, le dernier des Juges d’Israël et premier parmi les prophètes, est mentionnée comme une femme remarquable de la Bible, femme éprouvée dans sa stérilité comme Sarah, l’épouse d’Abraham, Rachel, l’épouse de Jacob, ou Elizabeth la mère de Jean Baptiste et cousine de Marie.

La coïncidence ne doit rien au hasard, comme nous l’entendons bien souvent, mais dans le langage biblique, il s’agit d’un appel à la grâce de Dieu agissant contre l’infécondité de la nature sous ses diverses formes, à l’origine de la naissance d’un prophète bien avant la naissance de Jésus qui sera connu comme le Verbe devenu homme.

Les orientaux comprendront ce cursus de la vie divine comme un acte de foi en l’Eternel partout présent en toute vie et en toute chair, traversant le malheur de son état, invoquant la miséricorde divine et trouvant son émerveillement dans le cantique d’Anne 1 Samuel 2,1-11...

Nous ne sommes pas dans un récit d’affabulation, ni dans une légende, mais dans un rapport personnel et spirituel avec l’auteur de toute vie qui dans la bible est toujours l’Unique, le Premier et l’Eternel !

1 - Samuel dans sa vie.

Un homme comme tout un chacun de la ville de Rama, Elcana a deux femmes. Il aime la première qui est inféconde, ce qui dans ce monde oriental est une blessure dont l’origine est signifiée comme une empreinte du mal. La seconde épouse, Peninna, lui a permis d’avoir des enfants, l’échange entre les deux épouses est cruel, difficile et permanent.

Donner la vie est, dans les civilisations premières et les plus antiques, la noblesse acquise de la mère dans le cœur de son époux et de la famille.

« Sa rivale cherchait par des paroles blessantes à la mettre en colère, parce que le Seigneur l’avait rendue stérile » 1 Samuel 1,6.

Seule perspective pour Anne, l’appel inespéré de l’Eternel, son unique salut dans son abandon, sa solitude et ses revers. La chose pourrait sembler sans consistance si par cas elle ne se vérifiait chaque jour dans nos environnements policés, éduqués, et par trop conventionnels sur de tels sujets ! Les gens de l’Orient trouve en la providence, « si Dieu le veut, Dieu seul le peut, à la grâce de Dieu, Dieu est miséricordieux »... une réponse à la détresse de l’humanité.

Le récit rapporte, Anne, Elcana et Peninna sont des fidèles du Temple chaque année au sanctuaire de Sila pour se conformer aux usages, se prosterner devant l’Eternel et lui offrir des sacrifices, 1

Anne est bien seule, doublement seule auprès de son mari et de sa rivale. Elle choisit de se retirer du monde, dans le temple, pour y chercher le soutien de son Seigneur. Les propos qu’elle murmure dans l’invocation adressée à son Dieu invisible sont repris dans la tradition spirituelle de la bible : « Seigneur de l’univers, si tu veux bien regarder l’humiliation de ta servante, te souvenir de moi, ne pas m’oublier, et me donner un fils, je le donnerai au Seigneur pour toute sa vie et le rasoir ne passera pas sur sa tête », 1 Samuel 1,11. Il sera donné sans retour, sans réserve à son Dieu...

Anne portera dans sa chair cette maternité dans la douleur, mais dans l’espérance en son Dieu, dans le détachement, l’humilité et l’oblation. Anne, comme Marie dans le récit de l’Annonciation, prononcera ces paroles qui ont traversé le cours du temps biblique : « Voici la servante du Seigneur, que tout m’advienne selon ta parole », Luc 1,38.

 

Le prêtre Eli qui sera témoin de cet étrange échange la prend pour une femme sous l’emprise de l’alcool, alors qu’elle est éprise de Dieu et confiera à Eli le soin d’éduquer Samuel.

Restons dans ce monde de l’Orient. Les détails du récit et le commentaire l’emportent sur toute interprétation. Murmure, chuchotement, digression, priment sur la rationalité, l’explication, et la justesse de l’expression.

2 - La reconnaissance.

Désormais une voie nouvelle s’ouvre pour Anne, elle sera mère comme le désire son Dieu tout autant que son mari. Désormais elle est connue et reconnue par Elcana, son mari, selon l’expression dans la bible de la reconnaissance qui n’est pas une formalité administrative. La naissance de Samuel en temps voulu par l’Eternel sera l’œuvre de toute la reconnaissance divine et humaine d’Anne, de ce fils désiré auquel le père donnera le nom de Samuel, « Dieu exauce » (1 Samuel 1,20. Selon la promesse faite par Anne, elle confiera son enfant au prêtre Eli, au temple, pour accomplir sa mission de fidélité à son Dieu.

La très belle prière reprise dans Samuel, au 2ème chapitre, donne la senteur spirituelle de l’interprétation de ce dialogue entre Dieu et Anne, « mon cœur exulte à cause du Seigneur, mon front s’est relevé grâce à mon Dieu », 1 Samuel 2,1.

On ne sera pas surpris de voir que Marie, dans la veine divine d’Anne, reprendra ces paroles gravées dans l’évangile à propos de Jésus : « mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur » Luc 1,39-56.

Au-delà des soubresauts de toute histoire de chacun, celles entre Anne et Marie, Elcana et Joseph, Samuel et Jésus, s’inscrivent dans un profond continu de Dieu qui est à l’œuvre dans et parmi son peuple.

François-Xavier Esponde

 

 

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